Gentiment mais sûrement, le néon « révélation » commence à clignoter au-dessus de Tshegue. Le buzz s’est même matérialisé sur la petite scène du récent festival We Love Green, quand plusieurs dizaines de spectateurs ont brusquement été happés par la transe, au rythme de turbines afro-rock qu’ils entendaient…
Lui, Nicolas Dacunha, natif de la banlieue parisienne, elle, Faty Sy Savanet, née à Kinshasa, grandi à Lemba, le quartier branché de la capitale congolaise, atterri à neuf ans en banlieue parisienne, avant de se révéler au micro avec le combo garage rock Jaguar.
Entre les deux, ça ne pouvait que fonctionner, une histoire de concordance des temps, une affaire d’énergie, l’essence à laquelle ils carburent chacun à leur manière, du genre singulière.
Entre ces deux électrons libres, pas mal d’atomes crochus : il suffisait juste que les planètes s’alignent pour que cette paire de complémentaires fasse des étincelles. Le nom du groupe, Tshegue, fait doublement sens : c’est le surnom de la chanteuse, c’est aussi le nom qu’on donne aux petits gars de la rue à Kinshasa. D’emblée, sa voix rauque et soul donne le diapason, ambiance rough, phrasé intense, boosté par des rythmiques épileptiques, tendance tribale. Survivor raconte entre les lignes le parcours d’une déracinée, les deux pieds plantés dans l’asphalte jungle, la tête tournée vers le terreau ancestral. Et ce qui suit suinte tout autant le bitume. Urbain, c’est certain, ce disque n’en témoigne pas moins d’un goût pour l’ambigüité, échappant à la pesante loi des catégories prédéfinies.
Noir et blanc, in & out, arty et catchy, DIY et ghetto blaster, minimal et dense, solaire et sombre, brut mais sophistiqué, spirituel et sauvage, homme et femme, tout est possible, tout se mélange en une transe insensée, qui nous touche corps et âme. Boom !